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Des professeurs sous menace.. L'omerta règne

Être enseignant, c'est exercer un métier passionnant et honorable... c'est transmettre le savoir, les valeurs et les choses de la vie. Enseigner c'est contribuer à construire une société équilibrée en développant les compétences des élèves d'aujourd'hui...les citoyens de demain.

Cependant, les professeurs, jadis, respectés, voire vénérés, parfois même sacralisés, sont, désormais, harcelés, insultés, menacés, agressés. Aujourd'hui, on en est arrivé à les poignarder. La perception de leur statut est, hélas, en train de devenir autre, au point que de nos jours, ce métier est devenu périlleux, aux risques imprévisibles..

Hier, lundi 8 novembre 2021, un élève de 17 ans agresse son professeur, à l'arme blanche (hachoir dans une main, couteau dans l'autre), en pleine classe. Il vise le front pour fracasser et le visage pour défigurer. Transporté d'urgence à la clinique la plus proche, il subira plusieurs opérations et l'on apprend qu'il s'en sortira. S'en sortir? Comment et dans quel état physique et psychique?

Ce n'est pas de la fiction. Il s'agit d'un fait qui a bien eu lieu au lycée Ibn Rachik d'Ezzahra, dans la banlieue Sud de Tunis. Que s'est-il passé ?


Quand l'enseignement devient un métier à risques...


Sahbi Ben Slama, professeur d'histoire-géographie, aura passé, ce lundi, une journée ordinaire dans l'établissement où il exerce, jusqu'à...16 heures, où l'inimaginable s'est produit.

Il n'avait, sûrement pas, imaginé qu'il allait être attaqué par l'un de ses élèves dans sa classe de l'établissement où il enseigne, mais l'inimaginable s'est produit...

Selon la directrice du lycée, Hadda Ezzine Amemi, l'agresseur, absent depuis une semaine, avant les vacances, s'est rendu à l'établissement scolaire, au moment de la récréation, sûrement avec l'intention de faire mal, très mal, affirmant qu'il n’y avait aucun motif ou cause qui puisse expliquer ce qui a été commis.

Pour sa part, Fathi Zeramdini, directeur général des affaires juridiques au ministère de l’Education, a affirmé, dans une déclaration accordée à Mosaïque FM que l'élève s’est rendu aux forces de l’ordre.

Le professeur, lui, a subi sept interventions pour soigner des blessures à la tête, à la main, sous l'œil et au dos. Il sera transporté à l'hôpital militaire de Tunis, suite à l'intervention du secrétaire général de l'UGTT.

Le ministère de l'Education solidaire avec Sahbi Ben Slama

Dans un communiqué, le département de l'Education s'est dit solidaire avec le professeur Sahbi Ben Slama, dénonçant l'agression qu'il qualifie d'acte d'une extrême gravité. Le ministre a, par ailleurs, annoncé que tous les moyens seront déployés pour garantir les droits de tous les enseignants et du personnel éducatif.

Ainsi, le secrétaire général du ministère et d'autres responsables ont été mandatés à se rendre à la clinique où a été opéré Ben Slama, afin de s'enquérir de son état de santé. Sa famille sera aussi encadrée, a ajouté le département, assurant que toutes les mesures juridiques nécessaires seront prises, en coopération avec les autorités et les structures concernées.


Appel à la grève

Suite à cet acte barbare, la Fédération a lancé un appel à la grève, aujourd'hui mardi 9 novembre 2021, dans tous les établissements pour exprimer la colère des professeurs et pour réclamer des mesures adéquates. D'autres mesures peuvent être prises ultérieurement, a noté la Fédération dans un communiqué, rendu public, hier soir.


La Fédération a, également, condamné le manque de réactivité du ministère de l'Éducation, face aux agressions quasi quotidiennes perpétrées contre les enseignants et le personnel éducatif.


Dans ce contexte, Lassaad Yacoubi, secrétaire général de la Fédération, a considéré dans une déclaration à la Télévision nationale, que ce forfait est le résultat d’un cumul et le prélude à une crise sociale sans précédent. Selon lui, le taux de violence et de sa marginalisation au sein de la société a fini par exploser.

Saïed réagit ?

Selon le secrétaire général de l'UGTT, Noureddine Taboubi, le président de la République lui a assuré, dans un entretien téléphonique, qu'un décret sera publié incriminant l’agression des enseignants.

Taboubi a assuré qu'il s'est, également, entretenu avec la cheffe du gouvernement, Najla Bouden et que cette dernière a fait savoir qu'elle suivait de près l'affaire et qu'elle était solidaire avec tous les enseignants.

Dans un état stationnaire, Sahbi Ben Slama a frôlé le pire. Mais son agression, qui n'est certainement pas la première touchant le corps enseignant, est tellement grave qu'elle doit marquer le pas initial majeur pour briser le silence et réagir face aux attaques, aussi bien morales que physiques, ciblant les professeurs, ces derniers temps.

Nos professeurs sont aujourd'hui sous menace. Des dizaines parmi eux sont maltraités par leurs élèves mais n'en parlent pas, par peur ou par honte d'être perçus comme incompétents... La situation se dégrade de jour en jour.

Parce que agresser un enseignant c'est agresser l'institution scolaire en général, il faut trouver des solutions radicales et instaurer des lois pour protéger les professeurs et leur permettre de travailler dans des conditions dignes de ce noble métier.

Peut-être, aussi, devrait-on mener, dès à présent, des campagnes visant à sensibiliser les parents, pour qu'ils fassent prendre conscience à leurs enfants de l'importance de l'école et de ceux qui y dispensent le savoir, de leur utilité et du devoir de les respecter, à défaut de les aimer, comme les aimaient nos parents et, encore plus, nos aïeuls.

Dorsaf Laâmeri